Article N° 8100

MÉDECINE ÉCORESPONSABLE

Vers une médecine écoresponsable : un classement des médicaments selon leur impact environnemental

Abderrahim Derraji - 19 mai 2025 10:20
Des scientifiques de l’Université de Lausanne (UNIL) et d’Unisanté ont récemment classé 35 médicaments couramment utilisés en Suisse selon leur impact environnemental, en particulier sur la  biodiversité aquatique. Cette initiative vise à fournir aux professionnels de santé un outil pratique pour intégrer les risques écologiques dans leurs choix thérapeutiques. Le classement repose sur l’écotoxicité des substances médicamenteuses, c’est-à-dire leur dangerosité pour les poissons, les algues et les bactéries essentielles aux écosystèmes aquatiques.
 
En effet, de nombreux médicaments ingérés par les patients sont ensuite évacués dans les urines, rejoignent les stations d’épuration (STEP) puis les milieux naturels, où ils ne sont éliminés que partiellement. Ce phénomène, reconnu comme un risque pour l’environnement, reste difficile à prendre en compte dans la pratique médicale quotidienne. Le classement repose sur le croisement de trois sources d’information : les 50 médicaments les plus vendus en Suisse, les substances disposant de seuils écotoxiques reconnus, et leur concentration dans les eaux du lac Léman et des rivières vaudoises.
 
Parmi les substances les plus préoccupantes figurent des antidouleurs et antibiotiques très répandus. Le diclofénac, par exemple, est toxique pour le foie des poissons, tandis que la ciprofloxacine peut perturber les bactéries utiles à l’équilibre des écosystèmes aquatiques et contribuer à l’émergence de résistances aux antibiotiques. En revanche, d’autres molécules comme l’acide méfénamique ou le paracétamol présentent un risque environnemental plus faible.
 
Malgré les limites dues à la rareté des données écotoxiques disponibles, les chercheurs espèrent que ce classement incitera les médecins à privilégier les options les moins nocives lorsque plusieurs traitements sont équivalents. Cela pourrait aussi encourager la réduction des prescriptions inutiles, notamment d’antibiotiques, et favoriser des alternatives non médicamenteuses.
 
Le projet s’inscrit dans une vision globale de la santé, dite «One Health», qui prend en considération l’interdépendance entre la santé humaine, animale et environnement. En ce sens, une médecine éco-responsable améliore non seulement le bien-être des patients en évitant la surmédication, mais contribue aussi à préserver les milieux naturels. Les auteurs plaident ainsi pour que l’impact écologique devienne un critère à part entière dans les choix thérapeutiques, dans un souci de durabilité et de santé publique.
 

Source : unil.ch